|
L'INDUSTRIE AERONAUTIQUE
ET SPATIALE FRANCAISE 1907-1982
TOME 2 1947-1982 LES STRUCTURES
Auteur : Collectif
Editeur : GIFAS
Année : 1984
Sujet : Histoire
Présentation : Nommé Président Directeur Général
de la Société Nationale Industrielle Aérospatiale
le 5 décembre 1975, j'étais immédiatement
coopté au conseil d'Administration du GIFAS sous la présidence
de Jacques Maillet. 1 er Vice-Président de notre Groupement
à partir de Juin 1977 aux côtés de René
Ravaud, j'étais appelé à lui succéder
dès la clôture du Salon de 1981. Renouvelé
en 1982 et 1983, c'est donc en qualité de Président
en exercice du GIFAS que je m'exprime ici, beaucoup plus en témoin
du temps présent qu'en mémorialiste, comme ont
pu le faire mes prédécesseurs.
René
Ravaud décrit dans son témoignage l'exceptionnelle
période d'expansion qui a été, de 1977 à
1981, celle de sa présidence dans tous les domaines techniques,
industriels, économiques et commerciaux. Cette situation
était d'autant plus remarquable, que déjà,
le second choc pétrolier secouait durement l'économie
mondiale et frappait la plupart des autres secteurs industriels,
l'Aéronautique et l'espace demeurant pour un temps épargnés
par la crise, bien que nos entreprises aient eu à faire
face, dès cette époque, aux conséquences
du désordre monétaire international et aux effets
négatifs des différentielles d'inflation pour maintenir
leur compétitivité sur les marchés mondiaux.
Cependant,
comme il fallait s'y attendre, l'industrie Aéronautique,
à son tour, a été touchée par la
crise dès la mi-81. La stagnation de l'économie
mondiale et la dérégulation sauvage ont entraîné
le plus grand désordre sur le marché du transport
aérien. Les politiques d'austérité budgétaire
menées par les grands pays industrialisés, l'endettement
critique des pays en voie de développement, le fléchissement
des moyens de financement des pays producteurs de pétrole
ont brusquement cassé le rythme des prises de commandes
avec une baisse corrélative d'activité généralement
ressentie dans nos entreprises. A ces motifs extérieurs
de préoccupation, se sont ajoutées les légitimes
interrogations sur les effets de la politique de transformation
économique et sociale préconisée par la
majorité nouvelle issue des élections présidentielles
et législatives de Mai et Juin 1981.
Dans
cette situation contrastée par rapport au passé
récent, des signes apparaissent cependant qui rendent
plausible une hypothèse raisonnable de reprise. C'est
au plan national, l'adoption d'une loi de programmation militaire
qui, malgré des insuffisances, fixe un cadre réaliste
au développement de nos activités. C'est également
le soutien actif des pouvoirs publics à nos efforts vers
l'exportation. C'est enfin le choix de solutions pragmatiques
pour la transformation des structures des grands groupes privés
(AMD-BA -MATRA -THOMSON) qui figuraient au programme des nationalisations,
évitant ainsi les ruptures brutales.
C'est,
au plan des programmes, les décisions touchant l'élargissement
de la famille AIRBUS avec le lancement de l'A 320, la préparation
du programme d'avion de combat futur que préfigure l'avion
expérimental dont le 1er vol est attendu en 1986, les
premiers essais en vol de l'ATR 42 et du Mystère Falcon
900, la coopération Franco-Allemande sur le programme
d'hélicoptère anti-char, le déroulement
des projets de missiles tactiques, la continuité des efforts
en matière de politique moteur civil et militaire, la
poursuite affirmée d'une politique spatiale innovatrice
tant du côté des lanceurs du type Ariane que des
satellites TDF-1 et Arabsat.
Ce
sont enfin les réalités concrètes d'un marché
potentiel en expansion, à terme inéluctable compte
tenu du vieillissement des flottes en service, de l'évolution
constante des concepts et des techniques qui font sans cesse
apparaître des besoins nouveaux, même si pour des
motifs de financement leur satisfaction doit être reportée
dans le temps.
Plus
généralement et dans une perspective à long
terme, il convient de souligner qu'au moment où nous assistons
à l'inexorable déclin des industries qui ont fait
la puissance et la richesse des nations, l'industrie aérospatiale,
pourtant déjà presque octogénaire, se situe
au premier rang des activités porteuses d'avenir. Parallèlement
au nucléaire, notre industrie aura été un
agent essentiel du développement des disciplines scientifiques
et des technologies nouvelles qui façonnent la société
de demain. Loin de céder la place aux activités
de progrès - informatique, systémique, visionique,
etc - dont elle a provoqué pour une part l'émergence,
notre industrie répond à des besoins durables et
recèle une formidable potentialité, en symbiose
avec ces disciplines et techniques nouvelles.
Les
pages qui suivent montrent comment notre industrie a su renaître
de ses cendres après les destructions de la guerre 39-45
et comment elle a su se hisser qualitativement au premier rang
mondial. Au delà des difficultés de l'heure, les
industries aéronautiques et spatiales françaises
ont clairement identifié les axes suivant lesquels il
convient d'articuler nos efforts :
-
Accroître toujours plus les investissements au niveau de
la recherche. A cet égard il convient de souligner la
convergence des politiques définies par les pouvoirs publics
et les projets des entreprises. Reste le plus difficile, à
savoir traduire les intentions dans les faits.
-
Promouvoir une politique de programme vigoureuse qui, sans avoir
l'ambition de tout couvrir, présente sur les marchés
des gammes cohérentes de produits réellement compétitifs
et pas seulement des spécimens isolés de brillantes
réussites sans prolongement face à la clientèle.
-
Poursuivre l'adaptation continue de l'infrastructure et l'organisation
industrielle interne dans la ligne de ce qui a été
fait dans les cinq dernières années.
-
Retrouver la souplesse de gestion et améliorer la rentabilité
des entreprises afin d'éliminer les rigidités qui
ne cessent de se surajouter d'année en année et
dégager des marges pour que les entreprises puissent effectivement
soutenir les politiques de recherche et de programmes.
Tous ces efforts demandent la mise en
place de moyens qui peuvent dépasser les seules ressources
nationales. Ils commandent donc une attitude pragmatique qui
nous conduit à préserver de front le maintien de
notre capacité propre à maîtriser les systèmes
complexes par le choix des programmes que nous entendons conduire
nous mêmes, et l'ouverture d'esprit vers la coopération
internationale pour certains programmes à haut risque
dont le financement et les conditions de pénétration
du marché dépassent nos possibilités propres.
Comment
conclure ces quelques réflexions si ce n'est en invitant
le lecteur à méditer sur le récit de la
grande aventure que lui proposent les pages de cet ouvrage. Il
y trouvera la réussite et le risque, l'audace et la prudence,
l'innovation et le savoir faire né d'une longue patience,
la réflexion et l'action, et partout l'effort et le travail.
A chaque page il y trouvera des hommes, illustres ou obscurs,
dirigeants, ingénieurs, pilotes, techniciens, financiers
ou administratifs et la grande cohorte des compagnons sans lesquels
rien n'aurait été et ne serait possible.
Jacques MITTERRAND
Appréciation : BIBLE |