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Jean SARRAIL
la ténacité courageuse
Il y a cinq ans, dans une chapelle
des Alpes, un père, une mère et une fiancée
priaient... c'était le jour , fixé pour un mariage
qui ne devait jamais avoir lieu. Le fiancé Henri, s'était
tué aux commandes de son bimoteur, moins d'un mois plus
tôt ! Le destin avait frappé le fils après
avoir épargné le père... mais à quel
prix puisqu'il s'agit de Jean Sarrail, pilote d'essais aux 6
700 heures de vol sur plus de 200 types d'avions et entre les
mains duquel est passée la majorité des prototypes
français de pointe de 1948 à 1968. Sorti premier
de l'Ecole d'Istres, pilote de chasse (3 citations, 2 victoires,
plus 3 probables), entré en 1946 au C.E.V., il est aujourd'hui
à 61 ans, commandeur de la Légion d'Honneur, Grand
Officier de l'Ordre National du Mérite.
Au terme d'une carrière partagée
entre l'Armée de l'Air. la société Leduc
(dont il fut le pilote d'Etat, puis pilote d'essais de 1952 à
1958) et le C.E.V., il dressait lui-même l'impressionnant
bilan de ses coups durs: « 8 accidents » n'ayant
pas eu de conclusion brutale « et dix » ayant provoqué
une arrivée brutale sur terre ou sur l'eau . Ceci comprend
le feu en « Spitfire » ; une arrivée au sol
à 15 m/s avec le Leduc 010 n° 2 ; un évanouissement
à 63 000 pieds en supersonique, etc. Son plus gros coup
dur restera son combat héroïque pendant 45 minutes
dans une mer avec creux de 2 mètres et des vents de 55
noeuds suite à l'utilisation du siège éjectable
d'un « Mirage » en feu en juillet 1961... sa plus
belle victoire, celle de la ténacité et de l'obstination.
Bel exemple pour les pilotes d'essais dont il assura pendant
des années la formation.
A un extraordinaire « métier »,
une exceptionnelle science du pilotage, un jugement sûr,
il ajoute la fine sensibilité des hommes de coeur.
J.
NOETINGER .
Air & Cosmos n° 867 du 4 juillet 1981 |