
Pierre Latecoère, le constructeur d tant d'avions, fut
aussi le fondateur de la grande ligne d'Amérique du Sud.

Au Bourget, l'aire de départ et d'arrivée en 1922.
Au fond, un « Goliath ».

Arrivée d'un avion de Londres. Les passagers descendent...

Maurice Noguès fut le grand créateur de la ligne
d'Extrême-Orient...
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L'aviation commerciale
Au lendemain de la première guerre
mondiale, les techniques avaient suffusamment évolué
pour permettre enfin d'envisager l'exploitation commerciale.
Dès 1919, des liaisons étaient
effectuées entre Paris, Londres et Bruxelles, avec des
appareils de bombardement rapidement aménagés pour
le transport public. Le 8 février 1919, la Société
Farman assurait le premier voyage de passagers sur Paris-Londres.
En 1921, la France exploitait régulièrement
les lignes Paris-Londres, de concert avec les compagnies anglaises,
Paris-Amsterdam, Toulouse-Casablanca.
Cette dernière, conception de Pierre
Latécoère, avait été réalisée
en dépit des difficultés, aussi bien finncières
que politiques, par le hardi novateur, secondé par un
personnel exceptionnel. Cette ligne, dans l'esprit de son fondateur,
ne serait que l'amorce de la future exploitation transatlantique
France-Amérique du Sud : il faudra près de quinze
année d'efforts et d'énormes sacrifices pour aboutir
au résultat définitif.
Toujours en 1921, la traversée aérienne
des Etat-Unis, sur la transversale New York-San Francisco (4
500 km ), était assurée réulièrement.
L'Angleterre possédait des services de Londres vers Bruxelles
et Amsterdam. La Hollande n'étendait guère son
activité que sur les pays du nord de l'Europe et l'Allemagne
ne possédait que des lignes d'intérêt local.
Pour la France, nous devons retenir les
noms de trois pionniers, dont l'influence fut définitive
sur les trois axes qui marquent le développement de notre
trafic aérien : Jean Dagnaux sur les routes africaines,
Maurice Noguès en direction de l'Extrème-Orient,
Jean Mermoz pour l'Atlantique Sud.
Le premier, colonel d'aviation, est tombé
en combat aérien au début de l'offensive allemande
de 1940; Noguès est mort dans un accident aérien,
au retour d'un voyage à Saïgon (1934) et Mermoz s'est
perdu en mer, au cours d'une liaison régulière
(1936).
Entre 1921 et 1934, la situation du réseau
aérien mondial ne cesse pas d'évoluer. Si nous
choisissons cette dernière date, c'est qu'elle marque
pour la France un tournant décisif dans l'histoire de
son aviation commerciale : la fusion de toutes les compagnies
exploitantes privées en une seule compagnie nationale,
la société Air France. Durant la période
de quize années considérée, le développement
des lignes aériennes s'était montré constant
et rapide.
En France, trois importantes compagnies, Air
Union, CIDNA et Farman, assuraient le service aérien complet
sur l'Europe; Air-Orient fonctionnait régulièrement
vers l'Asie mineure et l'Indochine; l'Aéropostale, répondant
aux voeux de Pierre Latécoère réalisait,
outre le trafic postal à travers l'Atlantique Sud, l'exploitation
d'un réseau important en Amérique latine, en dépit
de la concurrence de l'Allemagne et des Etats-Unis, enfin, Air-Afrique
s'ouvrait sur les routes du Continent noir.
En Allemagne, la Lufthansa exploitait un important
réseau intérieur, mais elle avait aussi commencé
l'exploitation d'un service postal accéléré
vers l'Amérique du Nord, en utilisant des hydravions catapultés
du pont de grands paquebots; la Deruluft cherchait des débouchés
vers l'Asie, en liaison avec les lignes soviétiques.
En Grande-Bretagne, les Impérial Airways,
seule compagnie anglaise, avait établi, outre un nombre
important de liaisons continentales, les deux grandes voies impériales:
Londres-Karachi et Londres-Le Caire-Le Cap. La coexistance, sur
les routes des Indes des exploitations anglaises, néerlandaise
et française assurait une fréquence de trafic relativement
accélérée.
Mais le réseau aérien des Etats-Unis
était, déjà en 1932, de loin le plus important
: 37 compagnies, disposant de quelque 2 000 aéroports
ou terrains d'atterrissage, d'environ 30 000 kilomètres
de voies balisées et éclairées par plus
de 2 000 phares spéciaux, disposant d'une sérieuse
couverture météorologique, avaient permis pour
la seule année 1931, le transport de 522 000 voyageurs
et de 4 400 tonnes de fret. Le service transcontinental était
assuré de façon remarquable, le parcours de New
York à San Francisco ne demandant que de 30 à 35
heures. A cette époque, le réseau intérieur
des Etats-Unis comptait un développement de 48 000 kilomètres,
sur lesquels près de 600 avions couvraient quotidiennement
plus de 200 000 kilomètres. La grande République
avait pu établir des bases aériennes en Amérique
du Sud, et l'on a vu qu'elle y contrait sérieusement l'action
de notre Aéropostale, ainsi que les efforts des organisations
allemandes.
Où en était-on à la veille
du deuxième conflit mondial ? En ce qui concerne les lignes
transatlantiques, celles de l'Atlantique Nord étaient
régulièrement ouvertes aux passagers depuis 1938
et la lutte s'y avérait sévère entre les
puissances compétitrices : Etats-Unis, France, Grande-Bretagne
et Allemagne. L'Atlantique Sud, longtemps exploité pour
le seul trafic postal, était mis par Air France en 1939
au service des voyageurs entre Paris et Santiago-du-Chili. Les
hydravions de la Pan American Airways traversaient régulièrement
le Pacifique depuis 1937.
La France, l'Angleterre et les Pays-Bas s'étaient
assuré la totalité du trafic vers le Proche et
le Moyen-Orient, la Grande-Bretagne était reliée
aux Indes et à l'Australie, la ligne française
mettait Saïgon à trois jours de Paris, tandis que
l'URSS s'ouvrait les routes de l'Asie par le grand Nord ou la
toundra sibérienne. En Afrique, la France et la Belgique
assuraient le trafic entre l'Europe, le Congo et Madagascar,
tandis que la Grande-Bretagne exploitait la ligne Londres-Capetown.
L'aviation commerciale avait pris un développement
particulier en Amérique du Sud après l'éviction
partielle de la France en 1934, la lutte restait circonscrite
entre l'Allemagne et les Etats-Unis, la politique d'expansion
et de prestige étant en cause, et notre pays ne gardant
la prédominance que sur la route transcontinentale Argentine-Chili
exploitée par Air France. Pour l'année 1938, un
total de 244 millions de kilomètres a été
parcouru sur le réseau aérien mondial et environ
3 900 000 voyageurs ont été transportés. |