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LE BAR DE L'ESCADRILLE
Auteur : Roland TESSIER
Editeur : Editions Baudinières
Année : 1941
Sujet : Histoire
Présentation : Ce livre n'est pas un roman.
Il n'est pas l'histoire d'un homme, de plusieurs hommes.
Il est l'histoire des hommes de l'aviation, des hommes
de la guerre, cette guerre , 1939-1940.
J'ai réuni en ces pages des croquis
de ce que furent leurs vols, leurs joies, leurs peines,. leurs
victoires, leurs deuils.
Je n'ai pas cherché à lier entre
eux - et surtout pas par une pauvre histoire sentimentale ! -ces
croquis.
A quoi bon ? .N'était-il pas plus vrai, plus
humain, plus sincère, de saisir au passage, avec simplicité,
netteté, vivacité, les périodes de leur
vie de combattants de l'air ?
Pas même n'ai-je voulu prendre un personnage
principal. Je les ai pris, eux, c'est tout. Eux de la grande
famille de l'air. Et j'ai écrit comme ils parlent, simplement,
sans phrases, sans mots, sans vouloir - je m' en défends
bien - fleurir une littérature que j'estime devoir être,
avant tout, celle du reporter.
On a beaucoup critiqué l'aviation après
notre lamentable défaite.
On a dit et on a écrit que l'aviation
militaire française n'avait pas fait son devoir.
C'est faux.
Nos pilotes, nos équipages, nos mécanos
ont accompli leur devoir, et souvent même plus que leur
devoir. Ils ont montré le plus pur esprit de sacrifice,
d'abnégation. Ils ont témoigné du plus grand
courage.
Ce n' est pas leur faute, à eux, si
pour cette guerre de 1939-1940 on a mis à leur disposition
des moyens et des matériels très réduits,
tant en quantité qu'en qualité. Ce n'est pas leur
faute si des politiciens sans scrupules les ont lancés
dans un ciel qui ne pouvait que leur être fatal.
Car le courage de l' homme ne peut suffire
à tout. Il faut qu'il soit servi, dans une guerre moderne,
par un matériel impeccable.
Que peut-on reprocher à un pilote restant
au sol faute d'avoir un avion à sa disposition ?
Les Français doivent comprendre que l'arme
qui eut dû être la plus puissante : l'aviation, était
peut-être en réalité la moins forte.
J'ai écrit la première partie de ce
livre (début septembre 1939 à fin avril 1940) durant
le premiers mois de la guerre. Cette première partie devait,
à elle seule, constituer un volume. Le manuscrit en avait
été déposé aux Edifions Baudinière
dans les premiers jours de mai. Ce livre n'a pu paraître.
On se doute pourquoi...
Je l'avais un peu oublié. Mais j'ai
entendu que des gens s'attaquaient non pas aux dirigeants responsables
de notre aviation, mais à nos pilotes et à nos
équipages martyrs.
Et j'ai crié : halte !
J'ai ressorti mon livre. J'ai relu mon manuscrit.
Mais je n'ai rien changé au texte. Tout simplement, dans
cette première partie, ai-je remis à leur place
les paragraphes et les phrases que la censure française
avait cru devoir supprimer en avril 1940. Car d'après
cette censure s'exerçant dans des bureaux bien chauffés,
notre armée de l'air ne manquait de rien, nos pilotes
remportaient force victoires sans subir jamais aucune défaite
!
Mauvaise plaisanterie...
Et j'ai ajouté une seconde partie.
La plus courte, mais la plus tragique,
Elle va du 10 mai à l'armistice. Elle
montre ce que fut la lutte des deux aviations ennemies, elle
dit pourquoi l'aviation française fut si malmenée,
elle explique aux combattants du sol la raison pour laquelle
ils furent si rarement survolés par les ailes françaises.
Il faudra comprendre.
Je l'ai dit et je le répète : les piloles et les
équipages ont fait leur devoir, ont tire le maximum des
matériels mis à leur disposition. Les responsables
de notre aviation - qu'ils soient ministres ou autre chose, cela
est sans importance - n'ont fait que des erreurs, que des bêtises...
que de la politique !
Qu'ajouterais-je ? Je pourrais, certes, durant
des pages et des pages, regretter et critiquer les dirigeants
qui négligèrent de donner à la France une
aviation digne d'elle. Je pourrais encore louer le personnel
navigant, mettre en lumière, dans cet avant-propos, son
courage et sa tenacité.
Mais à quoi bon ?
Mieux vaut, dès maintenant, laisser
parler nos hommes de l'air.
Le lecteur, quand il refermera ce livre,
aura compris quels furent les espoirs déçus, l'impuissance,
le crève-creur, les douleurs de l'aviation française.
Espérons que les Français sauront
se souvenir de ceux qui sabotèrent leurs ailes.
Et cc volume que j'ai écrit à
la gloire de mes camarades de l'air, je veux, simplement, le
déposer sur l'Autel de l'aviation, modeste gage de reconnaissance
et d'adieu à ceux qui ne sont plus, a ceux-là même
qui payèrent de leur sang les errements et l'insouciance
des dirigeants qui, sans que nous y fussions préparés
nous jetèrent dans la guerre.
R.
T. Février l941-
Appréciation : **** |