|
Daniel Rastel
Le fougueux
Lorsque le
11 novembre 1946, par un temps lamentable, décolla le
SO 6000 « Triton »
du terrain de Bricy, il fallait à bord un fameux pilote
! Le premier avion à réaction, conçu dans
la clandestinité par Lucien Servanty, avait un réacteur Jumo peu
sûr et insuffisamment puissant. Mais le vol eut lieu par
la volonté et l'habileté de Daniel Rastel, athlète
courageux, doué et expérimenté, faisant
équipage avec un mécanicien navigant de sa trempe:
Armand Raimbeau. Ce vol modeste fut un symbole: il y a 35 ans l'aéronautique
française abordait l'avion à réaction. A
Rastel échut l'honneur d'être le « fin cocher
» de ce prototype,
car il s'était consacré aux essais dès 1931
à Villacoublay, ayant été breveté
militaire à 18 ans. En 1935, comme civil, il entrait à
la SNCASO mais se permit une « digression » pour rejoindre les F.A.F.L.
et combattre comme chasseur, ce qui lui valut la Croix de Guerre,
la Légion d'Honneur, etc. Cette belle parenthèse
fermée, il reprit sa tâche avec plus de fougue encore.
Chef pilote d'essais de la SNCASO, il accumule les essais de
prototypes de toutes catégories et réussit le premier
à voler à 1 000 km/h en France grâce au SO
M 2.
Pour Daniel Rastel, il n'y avait pas de problème
insoluble. Il se consacrait avec passion à tout ce qu'il
faisait: les essais, la pêche en mer; le rugby... mais
aussi à l'amitié car il avait un coeur d'or caché
sous un caractère bouillant. A Bordeaux, chez Dassault,
le 21 juin 1960, il avait eu la joie de passer Mach 2, sur le
« Mirage III.. 01 »,
lui qui avait débuté en 1926 sur Spad VII, totalisé
6 000 heures de vol et vu son fils Max suivre son exemple comme
pilote d'essais... Il devait être vaincu par la maladie
en 1969... mais quelle carrière!
J. NOETINGER
Air & Cosmos n° 881 du 14 novembre 1981 |