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Louis Bonte
le catalyseur
Il y a trente
ans l'aviation française était une étonnante
volière de prototypes dont les essais étaient confiés
dans l'industrie, comme pour le compte des services officiels,
à des équipages déjà issus d'une
même caste: le C.E.V., Louis Bonte, homme d'une singulière
envergure, avait su donner à ce cénacle, une structure,
une organisation et surtout un esprit dont la réputation
s'était imposée jusqu'aux Etats-Unis. Sorti de
Polytechnique et de Sup-Aéro, l'Ingénieur Général
Bonte, tout au long d'une carrière trop connue pour être
ici résumée, s'est montré énergique
et éclairé dans ses jugements, ne ménageant
ni son temps, ni son travail. Aux prises avec les responsabilités,
il entendait " faire face " sans détour. Son
expérience de pilote d'essais avant guerre, à Villacoublay,
ses tâches à la Direction Technique et Industrielle
de l'Aéronautique, puis comme directeur du C.E.V. de 1948
à 1958, comblaient ses trois passions: l'aviation, la
technique et les hommes. Sous une cuirasse parfois redoutable,
car il savait être ironique, cassant, sévère,
il cachait une inépuisable générosité,
dépourvue de toute ostentation. Il était attaché
aux personnages de caractère, plein d'une infinie prévenance
pour ceux dont il perçait les problèmes. Célibataire,
habité par une foi d'acier, il a voulu faire de sa vie
d'action un exemple d'énergie, de droiture, d'honneur.
Il aura été un bâtisseur. Il voulait être
un guide pour ceux qui avaient soif de servir un métier,
une industrie, un drapeau. Ceux qui l'on connu ne peuvent oublier
son empreinte, sa clairvoyance, sa sagesse et son courage. Sa
soumission silencieuse, pour raison d'Etat, fut son dernier message
avant d'être victime d'un accident stupide à 63
ans le 1er Juin 1971.
Texte
et croquis J. NOETINGER .
Air & Cosmos n° 1133 du 7 mars 1987 |